Présidentielles 2022

Les destinées de Paris « Commune » ou « Etat dans l’Etat » ?

Dans la Capitale, les initiatives Hidalgo mettent en péril les relations institutionnelles actuelles nées dans le contexte historique des années 1970-1980

La Maire actuelle fait tout pour que Paris ne soit plus la capitale de la France ou que l’histoire revienne en arrière.

&

Paris occupe une « position » politique  stratégique

            Il y plusieurs dizaines d’années, en 1993, avec la parution du livre « Paris un État dans l’État », et en 1997, avec la parution du livre « La Méthode Chirac », j’avais proposé une analyse approfondie des institutions parisiennes et des relations institutionnelles existant entre Paris et l’État sur la longue durée : elle démontrait que le mouvement historique entre le pouvoir de l’État, et le pouvoir local, continuait à affecter le couple, pour tout un ensemble de facteurs qui continuent à jouer dans une relation par nature inégale entre institutions étatiques et institutions locales.

            Presque quarante ans après les réformes des années 70-80,  les relations institutionnelles que j’avais décrites sont à revoir complètement, entre Paris, soi-disant commune de droit commun, les communes et départements sacrifiés de sa banlieue, une métropole qui peine à exister, une région dynamique, et un État central bureaucratique légitimement contesté par nos provinces, sur un écran permanent de communication et de manipulation politique tous azimuts de la part des élus parisiens.

            La problématique historique tourne toujours autour de la « position » politique stratégique qu’occupe Paris sur l’échiquier national et international.

L’équipe municipale actuelle a bien assimilé la partition, sans doute trop bien, sauf qu’elle n’a pas les bases politiques nationales nécessaires, et qu’en prenant toutes sortes d’initiatives sur tous les plans, elle met en question à nouveau le bon fonctionnement de ce « cœur » institutionnel français, à la fois sur le plan régional avec la banlieue, proche ou lointaine, et sur le plan national, en rivalisant avec l’État, une situation qui appelle donc une nouvelle réforme institutionnelle.

            Les lecteurs un peu familiarisés avec les questions stratégiques connaissent l’importance que les stratégies directes ou indirectes accordent à ce concept de « position ».

Évocation d’un long passé institutionnel

            L’histoire des institutions parisiennes n’a jamais été celle d’un « long fleuve tranquille », même si la Maire de Paris a lancé sa campagne sur les rives de la Seine, à Rouen, un fleuve qui a structuré l’histoire de France, alors que cette dernière a « privatisé » les rives dans une ville de plus en plus enfermée sur elle-même, aux petits soins pour les Bobo de France ou de l’étranger.

            Il est tout de même surprenant que le Parti Socialiste, en perdition il est vrai, ait donné sa bénédiction à sa désignation comme candidate aux Présidentielles.

            Rien n’a jamais été simple à Paris, rien n’est simple de nos jours, et rien ne sera simple dans l’avenir, dans une  région toujours en mouvement dans un des cœurs de l’Europe et du monde.

            L’histoire de France n’a pas toujours  été confondue avec celle de Paris, mais très souvent et fort étroitement, et les gouvernements ont longtemps gardé la main sur les institutions parisiennes, en s’en méfiant, à juste titre.

            Sous la Troisième République, la loi du 5 avril 1884 qui a constitué la charte des communes de France jusqu’aux années 1980 n’était pas applicable à  Paris : il fallut attendre cette période pour que le préfet, représentant du pouvoir exécutif, passe la main à un exécutif élu.

            En 1978, dans leur conclusion au Colloque du Conseil d’Etat sur les institutions parisiennes, MM Thuillier et Tulard écrivaient :

            « L’administration de Paris a ses règles, ses coutumes propres en dehors des pratiques habituelles de l’administration : Paris a toujours eu le goût de l’autonomie poussé jusqu’à la fronde, ses administrateurs prennent des initiatives – en matière hospitalière, sociale, scolaire – tentent parfois des expérimentations en dehors de toute permission : c’est traditionnellement un Etat dans l’Etat et les bureaux des ministres n’osent guère contrôler ce qui se passe à Paris (ainsi, à l’ordinaire, le Ministre de la Santé a bien de la peine aujourd’hui – à contrôler l’Assistance Publique qui tend à régler ses problèmes directement avec les Finances).

            Les hauts fonctionnaires qui dirigent l’administration parisienne cherchent traditionnellement à échapper à toute tutelle, règlent directement leurs affaires avec les ministres, le Premier Ministre, ou parfois le Château… » (page 96, 97 du premier livre cité)

            «  En 1978… » : Après la réforme qui a redonné un Maire à la capitale en 1975, avec Chirac, antérieure aux réformes successives qui ont attribué de plus en plus de pouvoirs aux institutions élues de la capitale, le Maire et le Conseil de Paris, notamment, la réforme Defferre du 31/12/1982, sur la décentralisation, avec la création d’un contrôle de légalité a posteriori, un contrôle bien improbable, en tout cas dans les grosses collectivités locales.

            Dans le premier livre, en 1993, j’écrivais : « …qui commande à Paris, le Président de la République, le Maire, le Préfet ?… Le pouvoir local est-il vraiment un État dans l’État, comme beaucoup le disent et l’écrivent ? Comment est-il organisé, comment fonctionne-t-il ? » (p,8), et plus loin, sur la longue durée historique :

« L’histoire des pouvoirs publics parisiens met bien en évidence la complexité des relations qu’ont entretenues pouvoir central et pouvoir local et la permanence des enjeux de pouvoir à partir du moment où Paris est devenue la capitale de la France. » (p,13),

L’histoire des institutions parisiennes a été pour le moins chaotique, avec une succession d’accès de fièvre aussi bien sous la Royauté, les Révolutions, les Empires ou les Républiques, pour au moins une raison évidente et permanente, la « position » capitale qu’occupe Paris depuis des siècles, une « position » politique stratégique qui nourrit toutes les ambitions de pouvoir : la tentation a toujours été grande de prendre le pouvoir à Paris, la clé de tous les pouvoirs.

Dans la conjoncture actuelle et avec les Présidentielles, la « position » politique et stratégique de Paris a nourri, une fois de plus, toutes les ambitions, aujourd’hui celles de la Maire de la capitale, d’autant plus que la capitale constitue une plateforme d’images, d’information, de communication, de toutes sortes d’ « influences » sur les réseaux sociaux, donc une plateforme d’influence et de pouvoir sans égale, et tout autant de manipulation.

La Maire de Paris n’aurait sans doute pas pu bénéficier du soutien d’une équipe municipale, politiquement multicarte, si ses membres n’y avaient vu également leur intérêt, celui de disposer d’un levier politique qu’ils n’auraient jamais eu avec les minorités politiques ou civiles qu’ils représentaient, les communistes, les fractions écolos, et un Parti Socialiste exsangue.

Est-ce que la Maire de Paris et candidate aux élections présidentielles de 2022 n’a pas abusé de cette « position », alors qu’avant tout, elle est la Maire des minorités, des réseaux sociaux, et des initiatives démagogiques ? Il est évidemment légitime de se poser la question ?

En 1993, je notais que la lutte était engagée sur le terrain de l’information (p,37), alors que la municipalité de Chirac se dotait d’un impressionnant service d’information et de communication, tout en se dotant également d’une Direction des Relations Internationales, sorte de petit Ministère des Affaires Étrangères au service de la Ville de Paris, celle de Chirac, puis de Delanoë, et de nos jours d’Hidalgo.

Rappelons à toutes fins utiles que Chirac avait pris Paris avec la même ambition présidentielle, mais en s’appuyant sur un parti bien installé et toujours vivant sur le territoire national.

Tout a changé en trente ans avec l’irruption explosive d’internet et des réseaux sociaux qui fonctionnent sans contrôle et mettent en péril les institutions de la République.

La « position » stratégique de Paris et ses incidences politiques

          Afin de bien comprendre toutes les possibilités que recèle la « position » de Paris, il n’ y a rien de mieux que d’éclairer notre analyse par celle, complète, qu’en a faite François Jullien dans ses ouvrages, notamment « La propension des choses  – Pour une histoire de l’efficacité en Chine » (1992) et son « Traité de l’efficacité » (1996).

            François Jullien a analysé en profondeur plusieurs concepts d’analyse et de raisonnement stratégique familiers à la culture chinoise, « la propension des choses », la « disposition », la « position », des concepts qui  permettent de bien comprendre comment agit la « position » qui n’est plus celle des Empires Chinois, mais qui fait jouer les mêmes mécanismes stratégiques à partir de toutes sortes de « positions » naturelles ou construites, militaires, politiques, ou civiles, culturelles ou religieuses, etc…

Les concepts en question éclairent bien le fonctionnement d’une « position politique stratégique » comme Paris, jusqu’au « potentiel de manipulation ».

            Dans le premier livre, François Jullien écrit : « Le potentiel nait de la disposition (en stratégie) » (p,23) – « La position est le facteur déterminant en politique » (p,37) – « En occupant sa position, le prince régit les hommes comme s’il était lui-même le Ciel (la nature) ; il les fait fonctionner comme s’il appartenait lui-même au règne invisible des « esprits ». Ce qui signifie que, en laissant simplement œuvrer le dispositif de pouvoir que constitue sa position, il ne peut (de même que le cours du Ciel) dévier de la régularité de sa conduite ni, par conséquent, prêter à la critique » ; et que hantant le monde humain sur un mode invisible (à l’image des esprits), il n’aura jamais à « peiner », puisque ses sujets se sentent déterminés non par une causalité extérieure, mais sous l’effet de la pure spontanéité. Ils sont agis comme s’ils agissaient d’eux-mêmes, ils se prêtent à la manipulation comme si c’était l’expression de leur propre intériorité. Pourvu donc, que la « position fonctionne », si rigoureuse que soit l’injonction, elle ne saurait rencontrer d’obstacles » (p,48,49)

            « Conclusion  I Une logique de la manipulation

I – Conduite de la guerre – gestion du pouvoir : en même temps qu’on pressent une affinité certaine entre ces deux objets… Même analyse, donc, de part et d’autre : sur le plan pratique, se laisser voir, c’est donner prise à l’autre et le laisser avoir barre sur soi ; sur le plan théorique, le vrai manipulateur se confond avec le fonctionnement du dispositif. » (p,56 à 59)          

Le sinologue et philosophe montre bien à la fois ce qu’est une « position » et comment elle fonctionne grâce aux multiples « dispositions » d’actions et d’influences qu’elle recèle, pour ne pas dire, comme c’est à nouveau le cas aujourd’hui, un potentiel de prise du pouvoir, dans un nouveau face à face entre le local et l’étatique, entre la Commune et l’État, mais tout autant entre Paris et sa banlieue, Paris et la Région dans un contexte de millefeuille où la métropole n’a pas réussi à trouver sa place, et ne peut pas la trouver.

Années 2020

Les Points de rupture institutionnels

            L’équipe municipale actuelle met presque chaque jour la Ville de Paris en ébullition, sens dessus dessous : très récemment en chamboulant les voies de circulation, en multipliant les travaux, les interdictions, au mépris des habitants de la banlieue et des activités économiques de la capitale, comme si les institutions de l’Etat n’existaient pas, les assemblées ou le gouvernement, l’ensemble des représentations diplomatiques, les Préfets actuels donnant l’impression d’être aux abonnés absents : la Maire donne les ordres.

Je serais très tenté de dire que la Maire de Paris commet des « abus de pouvoir » sans contrôle, alors qu’elle s’appuie  sur une majorité politique hétérogène et éphémère.

La politique menée, excessive, ignore le rôle vital qu’un « cœur », quelle que soit sa nature, accomplit pour une bonne circulation du sang dans un corps, dans le cas présent dans l’ensemble de la région et bien au-delà.

 Paris est ouvert à tous les vents, souvent de l’étranger, avec par exemple un Qatar qui occupe, avec le PSG, une « position » de choix dans la communication de Paris et donc de la France, une forme de capture d’image qui ne dit pas son nom, alors que Paris s’enferme comme dans une forteresse, aujourd’hui Bobo, avec une équipe municipale des minorités et des réseaux sociaux

Le « périphérique » n’est pas uniquement physique !

Paris a pris tout un ensemble de mesures de circulation et de stationnement qui valent bien  les « octrois » du passé – il faut payer cher pour y accéder -,  des octrois supprimés en 1943 par le Régime de Vichy, en biffant la solidarité nécessaire entre Paris et sa banlieue.

Ajoutons enfin que Paris  reste au cœur de l’etablissment français qui continue à gouverner notre pays, à imposer sa loi et sa bureaucratie à nos provinces  françaises.

Conclusion :

il faut à nouveau tout changer et redistribuer les pouvoirs de la cité entre des institutions qui soient au service des citoyens dans toute la région d’Ile de France, avec un Etat passif et immobile de peur qu’on ne l’accuse de violer les libertés locales.

  • Il faut rétablir l’égalité et la solidarité des chances entre Paris et les cinq départements du Val de Marne, des Hauts de Seine, de Seine-Saint  Denis, du Val d’Oise, et de l’Essonne  et sans doute revoir la répartition des compétences entre institutions,
  • Il faut transférer à la Région Ile de France les pouvoirs de l’Etat dans les domaines non régaliens : économie, emploi, environnement, enseignement, santé, culture…

           Jean Pierre Renaud    Tous droits réservés

En 2022 Décoinçons la France Les propos de François Jullien

III
« Décoinçons la France »
(1)
Le propos Jullien 
Petit résumé


    L’auteur cloue au pilori les intellectuels « gestionnaires d’opinion et donc en quête d’audimat, » « les pseudo-philosophes… débitant de la fausse monnaie philosophique dans ce qui devient effectivement, avec eux, un marché des idées ». (p,22)
    « …Or décoïncider serait, intervenant un temps plus tôt, défaire de l’intérieur ce que la situation impliquait d’impasse dans son établissement… « Un temps plus tôt » pourrait défaire préalablement ce blocage de l’Histoire…Or dire que la décoïncidence, est quant à elle de l’ordre du processuel, non de l’exploit projeté, c’est indiquer qu’elle opère au sein même du devenir engagé dont il s’agit de recapitaliser les ressources à partir de son déroulement… Autant dire que l’art de la décoïncidence, opérant de biais, discrètement en amont… Pourquoi ne constituerait- il pas =, dès lors une politique ? Pourquoi ne deviendrait-il pas une chance – une force – pour la politique, à l’heure où reconnaissons-le, à la politique l’on ne croit plus guère. » (p,41)
    « La décoïncidence rouvre des possibles (p, 43 à 73)
    « … L’histoire de la philosophie est l’histoire processuelle de ces décoïncidences s’ensuivant sans fin…
    Qu’est-ce qui distingue un médiateur d’un juge ou d’un avocat, tous étant légitimes ? Ceux-ci organisent le pour et le contre, chacune des parties coïncidant avec son bon droit instaurant en position son adéquation : le « juste »… Or le médiateur tente de fissurer le mur érigé par les arguments adverses, si cohérents avec eux-mêmes de chaque côté. Par suite d’ouvrir un biais dans ce face-à-face de sorte que chaque partie soit conduite à décoïncider de sa position, de sorte qu’un jeu reparaisse, qu’une marge de manœuvre se déploie, qu’un débordement de chaque position peu à peu s’opère et que se libèrent des ressources qu’on n’escomptait pas. » (p,55)
   »  Il s’ensuit que le plus souvent, la Décoïcidence est d’emblée incomprise. De Gaulle n’a pas décoïncidé de l’ambiance défaitiste et de son idéologie du renoncement, mais à enchaîné les décoïncidences : en taznt que qu’exilé, en tant qu’allié, vis-à-vis du colonialisme et ou de l’américanisme. Ou du rétrécissement des possibles en France et de la perte de sa « grandeur » – j’y reviendrai. Car qu’est-ce, plus précisément, que décoïncider politiquement ? S’il n’y a pas eu jusqu’ici de préambule de ma part, c’est que je ne vois pas, à vrai dire, ce que serait une politique qui ne s’inscrirait pas dans une philosophie première ou générale. Que serait une politique, autrement dit, qui ne saurait  rouvrir des possibles dans la vie et l’histoire présentes ? Même si celles-ci s’étiolent lamentablement sous nos yeux. » (p,71)

III Coïncidence et idéologie (page 76)
« Partons donc, pour peser ce que peut-être la politique de la décoïncidence, de cette définition de principe : une idée, en devenant coïncidente, devient idéologique…


De là suit ce second principe : une telle coïncidence, en s’étendant collectivement, génère la bonne conscience…
On m’accordera volontiers, je pense, que ce phénomène de coïncidence idéologique a été puissamment renforcé, et même changé d’échelle et de nature, dans le monde contemporain. Il s’est décuplé, voir, maximalisé aujourd’hui, on sait pourquoi. D’une part le progrès des technologies de la Communication a abouti à la Connexions généralisée…… Peut-on encore faire trou, « fissure », dans ce grand maillage dont on ne peut plus se tenir à part, même en se marginalisant ?
« … La récente crise du Covid a été exemplaire à cet égard. Car… Qu’il faille faire attention ; prendre des précautions (se laver les mains, etc.) qui le contredira ? Mais fallait-il que se  répande cet endoctrinement et martèlement subi si passivement en termes de Care, porté par une telle adhérence et générant soudain tant  d’infantilisation et de docilité ? Car repris en boucle et ressassé  en faisant leur thème unique (reportages et chiffrages à bon marché, audimat facile à capter…
Car qui osait rappeler que la mort est dans la vie et l’avive, même si la société ne sait plus comment l’y ranger, et que mourir, quand on est en fin de vie, n’est peut-être pas tant à redouter… (p,79)) 
« On a raté là une chance historique (car l’art de gérer la crise, c(‘est  bien de faire du danger affronté une chance, comme le dit si bien – par coordination des contraires – le chinois : Wei-ji, « péril- opportunité » faire d’un péril une opportunité)…

Or je crains que cela ne se produise pour toute cause devenant une « bonne cause » en régime de médiatisation généralisée… Je  crains notamment que ce soit la cas, comme du Care, de l’«écologie ». Car qui ne veut « bien sûr » la préservation de la planète ? mais une langue de bois s’est secrétée et soudée – en termes d’ « écoresponsabilité », de « co-construction » et de « durable », etc, qui fait de ces thèmes obligés échappant par la-même au travail de conviction ; et ne prêtant plus qu’à l’assentiment passif, si ce n’est la manipulation… (p,83)
« … Mais décoïncider exige un travail d’interrogation, voire de soupçon, en amont, qui permette de défaire la condition de possibilité de cet effet de coïncidence collective devenant idéologie dominante et aboutissant à ce résultat… (p,85)
« … Je peux seulement, je reviens à ce terme modeste, la fissurer (belle formule de Soljenistyne à cet égard : « C’est quand même avec des fissures que commencent à s’effondrer des cavernes… »
« France ou la rétraction des possibles (p,94)
« … Je nommerai plutôt ce moment présent de la France, celui d’un retrait ou mieux – un terme plus processuel et graduel – d’une rétraction des possibles. Terme purement descriptif : il dit que les possibles se réduisent de façon endémique et globale, eu lieu de se déployer, et que ce rétrécissement s’opère progressivement sans qu’on s’en rende compte. »
« … Comme elle est mortelle existentiellement, la coïncidence est aussi ce qui bloque politiquement. Repérer les coïncidences idéologiques qui inhibent aujourd’hui ce pays, commencer de les fêler et de les fissurer, est une tâche actuelle, éminemment pratique, engageant politiquement la philosophie.
Cependant, on ne cesse de le dire, à raison, la France garde un grand potentiel (en termes de situation géopolitique, de culture, de savoir-faire comme aussi bien des paysages, etc.) bénéficie de conditions favorables et est riche de tous ces possibles que sont  ses ressources… Il faut donc s’interroger sur le phénomène de rabattement qui brime, retient, rétracte ces possibles dont la France est douée. Car rétraction n’est pas renoncement : « renoncement » est conscient, par rapport encore au volontaire, même si c’est pour l’abdiquer. Rétraction n’est pas résignation, car la « résignation » du moins se connait. La rétraction des possibles, ou leur rabattement, se fait à notre insu, se vit de façon ambiante, en vient à s’imposer comme une évidence collective et, par-là, n’est plus assumée. Le phénomène est implicite, se passe dans le non-dit et est vécu passivement. Peut-on encore avoir prise sur lui ? » (p,96)

II
Décoinçer la France et l’Europe

– Suite


« … Par suite, quelles décoïncidences sont à opérer, à cet égard, qui rouvrirait effectivement des possibles. Ce  champ des décoïncidences à introduire, des « coins » à enfoncer, est si divers qu’on ne peut l’aborder que chacun à sa façon, à partir de son expérience. Il me parait ainsi que, par esprit de démocratie, croit-on sans l’interroger, il y a en France, discrédit, non pars argumenté, mais coïncidant d’emblée, et par suite installé, vis-à-vis de tout ce qui est qualifié  « d’élitisme » : comme si promouvoir l’exigence de qualité allait nécessairement à l’encontre du plus grand nombre… Ou bien l’idée de servir (le fameux noblesse oblige » bien entendu parait d’emblée (c’est ce «  d’emblée » que je mets en cause) – par une coïncidence idéologique si adhésivement scellée, parce que non interrogée – une soumission insupportable et une aliénation…
 S’il y a un intouchable idéologique, en France, ce sont exemplairement les « vacances ». N’y-t-il pas là coïncidence massive qu’on ne saurait bouger ? C’est là, on sait une « exception »  française : on fête les occasions civiques en plus des religieuses qui perdurent sans qu’on ose y rien changer ; même le jour férié de la Pentecôte n’a pas été vraiment supprimé…Le macronisme à ses débuts pouvait faire espérer, il est vrai un décoincement et un dégagement des possibles. Mais sans doute le concept de « disruption » qui l’a symbolisé était-il encore trop lié au mythe de la Rupture, donc trop extérieur à l’effectif de la situation, et ne disait-il pas suffisamment de dés adhérence idéologique préalablement nécessaire – d’où l’insuccès. Car ce ne sont pas des questions thématisées et classées, ni même dans les mesures justement concertées dont les dossiers s’empilent dans les ministères, qui pourront y changer grand-chose. » (p,103)
« … Reparler de courage et d’effort en France – et plus encore des thèmes militants de « gauche » – serait effectivement décoïncidant et rouvrirait des possibles. Cela  pour ne pas avoir à s’enfoncer un peu plus avant dans la Dette, la démobilisation et le déresponsabilisation face à l’avenir. »
« … C’est pourquoi aussi, à la différence de la Révolution unitaire, dirigé et magnifiée d’en haut, il s’agit essentiellement, dans le travail des décoïncidences, d’initiatives sans commandement, s’insinuant en tout champ d’activité comme de la collectivité. Initiatives locales, de »terrain », d’abord diverses et discrètes, mais qui font leur chemin et se ramifient (comme des fêlures se ramifient) en s’épaulant progressivement… C’est donc latéralement, modestement et même minuscule ment, en enfonçant patiemment des coins dans cette inconscience collective que – par crissements divers, par échos multiples, retentissant d’un champ à l’autre et faisant dissoner la Coïncidence –une chappe idéologique enfin en vient à se fissurer. Seule façon peut-être d’éviter que les mesures prises n’aient plus prise ; ou que la politique patine, c’est-à-dire tourne en rond sans avancer ; par suite, qu’un pays verse alternativement dans la révolte ou l’atonie : que s’installe une désespérance. » ((p,105)
« Pour une seconde vie de l’Europe » (p,106)
« J’appelle une seconde vie qui, chemin faisant, décoïncidant de ce qu’elle a déjà vécu, s’ouvre des possibles jusqu’ici in envisagés, autrement dit inouïs. « Second » y dit ce qui, tout en « suivant », ouvre un écart et se dissocie de ce qu’on nommera rétrospectivement le « premier ». Non pas rompt avec lui, mais en dés adhère ou s’en dégage… On ne « change » pas alors de vie, il ne s’agit pas d’une nouvelle vie, toujours plus ou moins fantasmée : d’où viendrait encore une fois  la capacité de rupture ?
Mais sur l’acquis de sa vie passée, à partir de ce qui silencieusement y a muté, on peut, quand on y fait retour et qu’on en prend conscience, y trier, en tirer part et se décaler de ce qui devenant coïncidant, y apparait désormais stérile et déjà mort. Telle est même l’expression concrète, effective, de la liberté quand on n’en fait pas un vœu pieux (un pur idéal métaphysique)   . ne pourrait-il pas être aussi politique ? « (p,107)
« Il faudra en effet convenir à regret d’une chose, au-delà du destin même de la France et  de ce qu’elle vit de rétraction : une « première vie » de la construction européenne, débutée à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, est aujourd’hui en voie d’épuisement. Cette première vie a été positive, à l’évidence, et même miraculeuse, en tout cas riche d’effets propices. L’évidence même du fait le fait oublier : elle a banni, pour la première fois de l’Histoire, la guerre de son territoire. Mais aussi, elle a permis d’ouvrir cette « vieille Europe » en nouvel espace des « possibles » : d’engager une coopération de plus en plus étroite des économies, d’accorder les politiques de façon durable, de battre monnaie commune, etc. Par-là d’y promouvoir la possibilité d’un destin solidaire – le programme Erasmus notamment a fécondé l’avenir. »

Jean Pierre Renaud  –  Tous droits réservés  

Election 2022 – Décoinçons la France ! Comment ?

Election 2022 
Décoinçons la France !
Comment ?


Avec la stratégie directe souvent préférée par les stratèges occidentaux (modèle Clausewitz) ou la stratégie indirecte préférée par les stratèges chinois (modèle Sun Tzu) ?
Dans son livre « Politique de la décoincidence », le philosophe et sinologue François Jullien nous propose quelques clés pour l’avenir de la France et de l’Europe : il s’agit de « décoincer » nos processus de pensée politique, d’ouvrir de nouveaux « possibles » et de découvrir toutes nos « ressources » !


&


La France ne pourra recouvrer la santé en 2022, remettre le pays sur pied, sans faire preuve de courage, d’effort, de travail, de responsabilité et de clarté !
Une devise 
 » Une France des devoirs avant les droits !


&


Les principes de François Jullien dans ses livres
Ces principes peuvent  nous aider à nous décoincer en sortant le pays de ses ornières habituelles.
       Cela fait plusieurs dizaines d’années que je fréquente les œuvres de l’auteur avec pour objectif de décentrer nos processus occidentaux de pensée, marqués par le rationalisme de notre civilisation.
    J’ai travaillé sur plusieurs de ses livres pour tenter de mieux comprendre la philosophie chinoise, notamment sur la thématique des stratégies indirectes militaires ou civiles.
    Les deux livres « La propension des choses – Pour une histoire de l’efficacité en Chine » (1992) et « Traité de l’efficacité » (1996) sont utiles pour nous replacer dans le contexte stratégique des propositions de l’auteur : les concepts de « position », de « pouvoir », de « propension », d’« accès » et de « détour », d’« efficacité », de « cours des choses », de « potentiel » et en définitive d’« efficacité », dans :  « La politique de la dé-coincidence ».
    L’image de l’eau qui coule illustre bien le fil de cette pensée, mais encore faut-il savoir dans quel sens, avec quelle force, une force très différente selon les saisons, les parcours, leur longueur, l’usage qui en est fait, dans quel contexte historique, et avant tout comment utiliser cette recette stratégique. C’est dire l’importance de dessiner les cartes stratégiques possibles et choisies, en tentant de maximiser les avantages de la stratégie indirecte de la politique.
    La dé-coîncidence politique, est-elle la bonne recette stratégique ?
Comment faire pour décoincer de façon plus prosaïque la France et l’Europe ? Il faut débloquer nos processus de pensée politique dans l’Union européenne et en France, en ouvrant de nouvelles voies, pour « rouvrir des possibles » en nous appuyant sur nos immenses « ressources ».
La méthode chinoise est d’autant plus utile que le nouvel Empire chinois communiste sait l’utiliser à merveille pour asseoir son nouveau pouvoir, en usant du direct, la force quand c’est nécessaire, et la séduction, ou la faiblesse de ses adversaires potentiels et futures conquêtes de son Empire.
Vous trouverez en annexe un petit résumé du livre « La politique de la dé-coincidence »
    Décoincer la France et l’Europe, un beau programme !
Sans «  globish » !
Les téléspectateurs se « délectent » chaque jour du « globish » publicitaire ou médiatique dont le dernier chic est de parler en « english »: live et drive font la fête !
L’auteur a tout à fait raison de souligner que les langues de l’Europe constituent un trésor qu’il faut protéger et cultiver.
Imaginez un peu ce que peut être le résultat d’une éducation familiale dans les milieux défavorisés bâtie à coup de messages de pub répétés en « globish » !


Stratégie directe ou stratégie indirecte, entre le « frontal » et le « biais » ? En France, l’emploi des deux stratégies, la directe et l’indirecte sont nécessaires.
 Objectif Numéro 1 : occuper la « position de commandement », c’est à dire l’Elysée pour pouvoir enfoncer des « coins », exploiter des « fissures », car c’est l’élection qui donne la possibilité de gagner des « positions », dans le contexte constitutionnel actuel, d’entrainer les cordées.
Une « position de commandement » occupée par une équipe dont la composition aura été affichée, avant l’élection, et non par un nouveau « roi » solitaire.
Auparavant, les élections départementales et régionales donneront de leur côté la possibilité de renforcer, en deuxième ligne, les positions politiques qui permettront de lancer une offensive et de l’accompagner.

&

Les situations qui coincent en France et en Europe !
Le ras-le-bol bureaucratique !
Une bureaucratie coûteuse étouffe les initiatives et les libertés en France comme en Europe.
La gestion de l’épidémie de la Covid a été l’exemple manifeste chez nous, de la gestion centrale et bureaucratique d’un système de santé souvent présenté comme un modèle du genre : l’absence d’une stratégie de défense contre les pandémies, une superposition d’organisations de la santé au niveau gouvernemental, régional et départemental, la défaillance de la communication de santé publique…
On a donné la préférence aux bureaucrates plutôt qu’aux soignants. Tous les responsables politiques et publics le savaient depuis des dizaines d’années, mais font aujourd’hui semblant de le découvrir. La préférence a été donnée aux « bavards », les communicants politiques, ou non, tous « savants », plutôt qu’aux « actifs ».
Le Parlement vote des lois à tout bout de champ et cela continue, en multipliant les difficultés d’application et en édictant souvent des règles stupides : la loi ALUR, c’est-à-dire l’écologie béton, pourrait être citée comme le bon exemple de cette maladie dévorante familière à nos élites qui veulent toujours donner d’autres fondements théoriques et nouvelles règles du jeu à la société française : de nos jours le tout vert, après le tout social, quel que soit leur prix et leurs effets.
Comment ne pas évoquer la bureaucratie tâtillonne qui écrase beaucoup d’initiatives et de créativité dans le vivier des TPE qui sont au coeur de nos territoires et qui les font vivre ? Plus de la moitié des emplois en France et de l’ordre de 10% du PIB !
Aujourd’hui « l’écocide », après « le principe de précaution », il va falloir l’expliquer aux citoyens, aux avocats, aux juges, aux médias, aux réseaux sociaux qui vont s’en donner à cœur joie, et à toutes les associations qui vont naitre d’une génération spontanée.
Qui paie les avocats ? Les contribuables ?
Depuis plusieurs dizaines d’années, les majorités successives ont multiplié comme à plaisir les feuilles du millefeuille administratif, des communautés de communes qui ont encore augmenté les effectifs et les coûts des anciennes collectivités encore bien ancrées, de grandes régions qui n’arrivent pas à supprimer les duplications de compétences et de coûts, le manque de clarté dans les compétences fixées entre communes, départements, métropoles, régions, et Etat.
En Ile de France, n’aurait-il pas été plus simple et moins coûteux d’attribuer les compétences de la nouvelle métropole créée à la région d’Ile de France ?
Le qui fait quoi entre l’Etat, toujours parisien et les collectivités !
Le qui fait quoi entre la France et l’Union Européenne ?
Actuellement, en Europe, il est quasiment impossible de savoir qui exerce le pouvoir, entre l’Assemblée, la Commission, le Conseil Exécutif, et de plus en plus les Juges ?
La République n’est plus à même de défendre une conception des institutions européennes qui respecte la subsidiarité nécessaire, les différentes cultures des pays de l’Union, car l’Europe manifeste l’ambition de réglementer notre vie nationale en jouant des trois armes que constituent la nouvelle justice européenne, l’appât  des subventions, et le fatras réglementaire des institutions de l’Union.
En parallèle et en France, l’Etat se mêle de tout, asphyxie les pouvoirs locaux, reste entre les mains de l’establishment parisien, alors même qu’il est incapable d’assumer ses missions régaliennes de contrôle des frontières et de paix civile.
L’Etat laisse prospérer la délinquance et les incivilités, et un nouvel état de droit qui donne la priorité aux délinquants au lieu des victimes, et aux minorités.
Pour tout dire, la France vit de nos jours dans une sorte de chaos judiciaire, compte tenu de l’évolution et de la paralysie de justices, souvent concurrentes, sur le plan national et européen.
Les dernières années ont fait émerger les revendications légitimes de la France des territoires, un appel à de nouvelles libertés, de nouvelles solidarités qu’exigent les grands bouleversements provoqués par une urbanisation croissante, la désindustrialisation, la numérisation des services publics, de l’économie et de la société, la poussée de quartiers sensibles qui ne partagent pas notre culture…
La connerie et la veulerie des Français dont on ne parle pas assez : Jamais Assez ! Jamais contents !
On gueule mais on ne vote pas !
Oui, mais on fait tout pour ça !
Ils se croient toujours les plus intelligents de la terre.
Le Président actuel n’en constitue-t-il pas un symbole ? Donneur de leçons à la terre entière !
Jamais assez ! Mais on préfère ne pas travailler, ne pas faire trop d’effort, et avant tout, les vacances, les sacro-saintes vacances !
L’esprit de partage du collectif ne se réduirait-il pas au partage de ce mythe ? Alors que dans les territoires il existe déjà de beaux exemples d’actions collectives.
Les vrais pouvoirs du jour : les associations, les médias et les réseaux sociaux en dehors de toute légitimité démocratique et constitutionnelle, avec l’insuffisance notoire des contrôles de légitimité juridique et financière !
Curieusement, de nombreux médias font écho en permanence aux informations vraies ou fausses des réseaux sociaux qui peuvent raconter n’importe quoi : venant de réseaux sociaux de l’étranger ou de France, les citoyens ont pu faire la connaissance des nouvelles folies d’un racisme nouvelle mode.
Les pouvoirs publics distribuent chaque année, pour le compte des contribuables, à des milliers d’associations soi-disant reconnues, mais jamais contrôlées, plusieurs milliards d’euros.
En France, une classe de fonctionnaires trop longtemps choyée au détriment des entreprises françaises dont dépendent en réalité nos moyens de vivre et de nous défendre, c’est à dire d’exister ! La France des fonctionnaires que nous avons réussi à exporter outre-mer.
La politique de l’Etat à l’égard du secteur très vivant des TPE n’est pas à la hauteur du rôle clé qu’elles jouent dans le pays et du vivier phénoménal qu’elles constituent avec des hommes et des femmes qui n’ont pas eu peur de prendre des responsabilités et qui manifestent un bel esprit d’entreprise et de prise de risque.
Ces petites entreprises croulent sous une réglementation changeante, indéchiffrable, les contraignant à faire appel à des expertises extérieures coûteuses dont disposent les grandes entreprises en leur sein.
Elles ne bénéficient pas d’une égalité de traitement pour leur accès aux marchés publics auxquels elles pourraient concourir.
Ajoutons à cela que les services de l’Etat ont trop tendance à considérer que les chefs de ces entreprises sont tous des fraudeurs, en oubliant que les multinationales connaissent elles les bonnes ficelles de la défiscalisation en France ou à l’étranger, avec des enjeux qui ne sont pas comparables.
L’absence d’une vision commune de la nouvelle puissance européenne.
Une Europe trop redondante !
A suivre l’actualité française, européenne et internationale, il est clair que chacun des pays de l’Union a tendance à jouer son propre jeu international avec les grandes puissances du monde, aujourd’hui encore les Etats Unis et la Russie, l’ancienne URSS, et les nouvelles puissances montantes, Chine, Inde ou Brésil.
Il est évident que ces jeux diplomatiques de toute nature manifestent, 1) que l’Europe ne constitue pas encore la puissance qu’elle devrait avoir compte tenu de ses moyens, de ses « ressources », 2) que la situation actuelle offre à ses rivales maintes occasions stratégiques d’influence ou de contrôle : la Chine développe un véritable savoir-faire stratégique dans le direct et l’indirect pour développer sa nouvelle puissance impériale.
Il est tout de même curieux que les pays européens développent des relations économiques de type occidental en feignant de croire qu’on puisse contracter des relations économiques normales entre économies de marché et économie étatisées de type Chinois.
Laissons respirer la France !
Redonnons de l’air aux initiatives locales, beaucoup d’air, transférons des pouvoirs de l’Etat aux régions et aux départements, dans les domaines de l’emploi et de la formation, de l’enseignement, de l’économie, de la santé, de l’environnement, l’Etat ne conservant que le régalien et l’international.
La France crève d’une bureaucratie politique parisienne qui continue à vouloir faire la pluie et le beau temps, et y a ajouté la mise en œuvre d’une philosophie d’action européenne du tout marché qui trouve ses fondements dans un ailleurs mondial qui asphyxie le rêve français.
    Les ressources de la France  
La France dispose encore d’une immense réserve de ressources, ses paysages, ses terroirs, ses itinéraires religieux prestigieux à travers « son blanc manteau d’églises » (Glaber, Xème siècle) romanes et gothiques, ses modes de vie, sa gastronomie, ses traditions, ses libertés locales, son goût ancien  pour un vivre ensemble national, son histoire avec ses ombres et ses lumières…
Ses universités, ses laboratoires, ses théâtres, ses orchestres, ses stades et leurs équipes…
Sa culture, mais tout autant son goût déjà ancien pour la culture !
Sans oublier l’Europe des religions,  un patrimoine religieux façonné par des guerres de religion du passé et fondé de nos jours sur la liberté de conscience, le respect des convictions d’autrui, et le refus du mélange des genres et des pouvoirs entre le religieux, le politique, ou le civil.
Le pays a besoin de rétablir le régalien, de faire prévaloir le principe du respect des devoirs du citoyen avant celui des droits, la maladie qui ébranle sérieusement la société, la refonte complète de la panoplie des peines face aux infractions de toute nature et du système judiciaire lui-même qui aboutit aujourd’hui à sacrifier les victimes au profit des délinquants: immédiateté de certaines peines, exécution immédiate, cantonnement des anciens djihadistes dans d’autres lieux que les prisons, tels qu’anciens forts et îles…
La France a besoin de respirer en retrouvant une autonomie de souveraineté pour le contrôle de ses frontières et de l’immigration, une autonomie de vie dans la santé, ses productions vivrières, ses industries stratégiques, sanitaires…

Suite en II

Election 2022 – Décoinçons la France ! Comment ?

Elections 2022

Décoinçons la France !

Comment ?

II

Que faire ?
– Stop à l’immigration des populations venues du dehors de l’Union ! Instaurons un moratoire de trois ans afin de réexaminer pays par pays les modalités d’échange de populations.
– Ne sous-estimons pas les effets dévastateurs politiques et sociaux d’un traitement social plus favorable de l’étranger par rapport au citoyen français : exemple de la CMU !
– Revitalisons le suffrage universel et la démocratie, avec le vote obligatoire dans les élections politiques et professionnelles.
– Le respect de la loi, de l’autorité publique, de la séparation des pouvoirs entre les Eglises et l’Etat, gage de paix civile. 
– La lutte contre le réchauffement climatique fondée sur les initiatives locales, celles du terrain, et non sur les élucubrations des écolos ! 
–  Des Régions motrices du progrès économique et social ! 
Transférons les pouvoirs de l’Etat « parisien » aux Régions, dans les domaines de l’écologie, de la santé, de la formation et de l’emploi, du développement économique, et de la culture.
Une équipe restreinte de ministres qui gouvernent au lieu de communiquer.
L’introduction d’un service militaire obligatoire de six mois dans le cursus universitaire de l’ENA, trois mois d’école militaire et trois mois dans un régiment constitutif de notre force d’intervention.
Depuis 2002, suite à la suppression de la conscription par Chirac en 1997, les hauts fonctionnaires n’ont aucune expérience militaire, ce qui ne les empêche pas de conseiller le gouvernement en matière d’intervention militaire.
– Le rétablissement de la République dans les quartiers sensibles avec un vrai programme global de développement culturel, social, éducatif, économique, donnant accès à la République,
– Une justice de proximité avec des sanctions immédiates pour toute incivilité constatée avec des lieux d’accueil contrôlés, les nouveaux chantiers d’intérêt général,
Stop à tous les droits ! Une France des devoirs et de la responsabilité, avant les droits !
Réhabilitons  le travail au lieu de l’assistanat, le respect d’autrui et de la politesse, l’école républicaine (arrêt du tutoiement, blouses communes…)
Affichons le coût réel des services publics rendus aux citoyens chaque fois qu’ils en bénéficient : une facture de frais de santé ou de frais d’école
Un remboursement intelligent et progressif de la dette publique, une dette colossale qui met la France sous le contrôle de ses créanciers.
L’Empire chinois ne réédite-t-il pas avec beaucoup de pays d’Afrique ou d’Asie la vieille recette utilisée jadis par l’impérialisme occidental pour mettre la main sur des terres à contrôler ?
– L’Etat doit assurer ses missions régaliennes de sécurité et de défense, et ses missions internationales au lieu de se mêler de tout dans nos villes et dans nos campagnes,
– L’Etat doit établir la liste des activités économiques stratégiques de défense, de santé, d’industrie, d’approvisionnement en matières premières, de nos fabrications et de nos services, en les protégeant et en les dynamisant. 
– La France doit avoir l’obsession nationale permanente de préserver notre ligne de vie :  la conservation et  le développement d’un tissu d’entreprises actives, innovantes, et vivantes, de préférence à des services publics redondants. Il faut revoir la carte des services publics entre ceux d’intérêt public (santé, sécurité…) et les autres.
La France doit tout faire pour entretenir et fortifier le vivier de petites et moyennes entreprises qui la font vivre, et qui la feront vivre, simplifier et alléger la bureaucratie actuelle et toujours en mouvement, trouver une solution de financement et de garantie d’emprunt qui ne fasse pas courir un risque démesuré à ces entreprises, ce qui veut dire, en cas de difficulté, la mise sur la paille de leurs dirigeants appelés en garantie à titre de cautions personnelles !


&


Puissance Française et Puissance Européenne
 Face à l’absence d’une vision politique commune de la nouvelle puissance européenne.
Les Liaisons Dangereuses
Mettons sur la table l’ensemble des traités qui nous lient aux pays de l’Union pour y réintroduire de la clarté ! – Rétablir nos Franchises de Souveraineté : mise à jour des traités entre compétences de l’Union et celles des Etats européens sur le domaine de souveraineté des Etats.
A suivre l’actualité française, européenne et internationale, il est clair que chacun des pays de l’Union a tendance à jouer son propre jeu international avec les grandes puissances du monde, aujourd’hui encore les Etats Unis et la Russie, l’ancienne URSS, et les nouvelles puissances montantes, Chine, Inde ou Brésil.
Il est évident que ces jeux diplomatiques de toute nature manifestent, 1) que l’Europe ne constitue pas encore la puissance qu’elle devrait avoir compte tenu de ses moyens, de ses « ressources », 2) que la situation actuelle offre à ses rivales maintes occasions stratégiques d’influence ou de contrôle : la Chine développe un véritable savoir-faire stratégique très ancien dans le direct et l’indirect pour développer sa nouvelle puissance impériale.
Il est tout de même curieux que les pays européens développent des relations économiques de type occidental en feignant de croire qu’on puisse contracter des relations économiques normales entre économies de marché et économie étatisées de type Chinois. 
Est tout aussi éclatant, le manque de clarté, pour ne pas dire la confusion des pouvoirs en France et en Europe, dans le qui fait quoi, dans le qui exerce la compétence, dans la plupart des activités nationales, en violation continue du principe de la subsidiarité qui devrait régir la répartition des pouvoirs.
Confusion des pouvoirs, mais tout autant et de plus en plus les empiètements judiciaires des juges européens sur la souveraineté de chacun des Etats, dans un halo de compétences incertain.
Donnons à notre pays et à l’Europe de nouveaux caps, de valeur ajoutée et de partage pour l’Europe dans l’espace, les frontières, les sciences qui constituent encore un de nos atouts, mais aussi la culture.
L’Union jouit d’un immense privilège dans le domaine de la culture, des cultures de chaque pays, sans égal par rapport à la plupart des pays du monde : faisons le valoir plus encore, car il s’agit d’un atout de puissance qui vaut largement d’autres, tels par exemple celui des forces de maintien de la paix.
La responsabilité et le courage, car ni la France, ni l’Europe, ne retrouveront puissance et rayonnement entre Etats-Unis, Chine, Russie et Inde, sans renoncer à leur goût du retrait et de l’abandon.
Foin du ras le bol bureaucratique !

La subsidiarité à grandes voiles !
Avec des ressources scientifiques et culturelles sans équivalent dans le monde, développons une stratégie de l’intelligence et de la culture.
Les ambitions d’une puissance française à la fois souveraine mais solidaire dans des compétences partagées
Il s’agit d’un débat complexe qui met en jeu une multitude de facteurs français et européens, historiques ou non, rationnels ou irrationnels.
Premier constat, retrouvons tout d’abord la santé !
Dans notre pays, le débat est difficile car une partie de notre élite rêve toujours d’un passé, souvent lointain, du rôle joué par une France dont la puissance, puissance coloniale ou néocoloniale, même malmenée, continua jusqu’en 1945, à jouer son rôle de puissance mondiale.
De Gaulle eut le grand mérite de nous réintroduire, presque miraculeusement, dans les jeux mondiaux, avec les deux môles stratégiques du Conseil de Sécurité et de l’arme nucléaire: les traités européens et l’Union Européenne ont contribué à y ajouter une autre dimension stratégique, mais insuffisamment structurée.
La France a conservé une certaine puissance de défense avec l’atome et l’armée de métier, mais il est clair que tout reste à faire pour que l’Union se dote d’une capacité de défense et d’intervention en cas de crise, et ait le courage d’affirmer sa puissance, son autorité, et son influence au sein de nos alliances, notamment l’OTAN.
L’Europe a bien d’autres atouts que la force armée pour faire rayonner sa puissance, ses richesses artistiques et culturelles, ses universités, ses laboratoires, ses entreprises, ses savoir-faire politiques, mais elle ne peut s’en passer sauf à continuer à vivre sous l’ombrelle américaine.
Il faut donner naissance à une puissance de l’Union à géométrie variable,  avec un cœur de réacteur décisionnel des pays qui partagent la même politique étrangère à l’égard des grandes puissances (Etats-Unis, Russie, Chine, Inde, Brésil…) et à l’égard des puissances instables ou dangereuses, la Turquie, la Corée du Nord, l’Iran, ou le Pakistan…
Pourquoi ne pas mettre sur pied une Union qui fonctionne comme une équipe sportive dynamique et solidaire ?
Un seul Conseil exécutif pour les pays solidaires, un seul ministre des Affaires étrangères de l’Union partagée, des Ambassadeurs dédiés dans les pays d’accréditation, disposant d’un corps d’intervention et de défense militaire.
Les décisions du Conseil exécutif seront prises à la majorité simple, et soumises pour avis à une Assemblée constituée des députés européens appartenant à l’Union partagée.
La France acceptera de faire un saut stratégique institutionnel en partageant son siège au Conseil de Sécurité et en partageant sa défense nucléaire, du donnant donnant pour permettre  à la nouvelle puissance d’exister et de fonctionner.
Nous ne sommes plus au « temps des colonies » !
Remettons sur la table pour examen et actualisation tous les traités qui nous lient encore aux Etats que nous avons décolonisés il y a presque 60 ans.
L’Union partagée aura pour mission de projeter son action dans les années à venir, avec une valeur ajoutée d’action et de défense dans l’espace, la cyberdéfense, ou le quantique…
Dans sa forme la plus large, l’Union consacrera beaucoup d’initiatives pour faire rayonner sa culture, ses savoirs, sa manière de gouverner, son modèle politique et social fait de liberté, de démocratie, et de contre-pouvoirs.
L’Europe a besoin d’un cœur de Puissance 2 dans une nouvelle Union à géométrie variable, une géométrie variable que les institutions ont reconnues dès les origines au profit de quelques pays de l’Union.
Les ressources scientifiques et culturelles de la France et de l’Europe sont sans équivalent dans le monde. Elles constituent les atouts d’une stratégie incomparable d’influence de l’intelligence et de la culture, sans avoir besoin de dominer.


Jean Pierre Renaud, un « coin« (1) préfectoral, avec Marie Christine, un « coin » judiciaire,  et notre fille Anne, le « coin » entrepreneurial
(1) une des voies citées par François Jullien
– Tous droits réservés –

Paris, les élections municipales 2020, la problématique politique et institutionnelle

Élections municipales 2020

Éclairage de la problématique institutionnelle et politique parisienne
Rappel de mon analyse du 15 janvier 2020 à toutes fins de réflexion utile

« Paris 2020 »

« Paris, un autre État dans l’État »

Avec le clin d’œil littéraire de Miguel de Cervantès et de Jean de La Fontaine

Avec un clin d’œil chinois et stratégique : « La propension des choses » de François Jullien »

« Paris 2020 » « Paris, un autre Etat dans l’Etat »

Avec le clin d’œil littéraire de Miguel de Cervantès et de Jean de La Fontaine

Avec un clin d’œil chinois et stratégique : « La propension des choses » de François Jullien 

         Introduisons ce sujet austère avec un extrait de l’interview de Bruno Duteurtre (Figaro du 23 décembre 2019), sous le titre « Le cycliste n’admet aucune loi » ? Les quelques lignes de conclusion de cette interview décrivent parfaitement la situation actuelle de Paris aux prises avec la démagogie politique, mais aussi le désordre de gestion  des affaires publiques qui ont cours depuis quelques années :

« … Aujourd’hui, on détruit l’allure même des grands boulevards pour donner à la bicyclette une priorité sur tout. Et, tandis que la rue se divise en multiples voies réservées, on voit s’accroitre un « communautarisme » de la circulation où chaque tribu s’oppose aux autres dans un même ressentiment : vélos contre piétons, trottinettes contre taxis, joggers contre promeneurs. Nous voici loin du radieux « partage de l’espace urbain. »

            Les rapports de forces institutionnelles entre Paris et ses banlieues, entre la collectivité locale Paris et l’Etat ont été complètement modifiés entre l’année 1977, début du nouveau régime institutionnel parisien, et l’année 2020.      

     Les principaux facteurs de cette évolution en sont l’émergence d’une écologie qui se veut parisienne, la « méthode » Hidalgo qui n’a plus rien à voir avec la « méthode » Chirac, le règne de la Com’, et des nouveaux réseaux sociaux dont les sources sont souvent parisiennes, avec l’écho continu donné à l’accueil des étrangers,  et pourquoi ne pas le dire, un affaiblissement de l’État régalien dans la capitale.

            Dans la capitale, la relation Ville-Etat manque de plus en plus de clarté, et seuls quelques initiés peuvent en déterminer les champs et les compétences.

            Le « Paris Bobo » que je décrivais brièvement, il y a quelques mois, sur ce blog, n’a pas battu des records de propreté, de bonne gestion de l’espace public – voir les trous partout, le désordre des vélos et des trottinettes sur nos trottoirs, avec morts et blessés -, les excès de vitesse permanents des véhicules dans nos rues, alors que la municipalité se pique quotidiennement de vouloir diminuer la pollution causée par la circulation.

            Les conditions de circulation, de livraison, et de stationnement, des véhicules et des camions sont à revoir complètement, avec des vitesses limitées et signalées, sous le contrôle de caméras et de radars, là où cela est nécessaire.

        Plus grave encore, comment ne pas constater la dégradation continue de la « tranquillité publique », alors que la municipalité se rallie enfin, pour des raisons « électorales », à la création d’une police municipale ?

     L’État doit faire prévaloir dans notre capitale, qui  abrite les institutions de la République et les représentations diplomatiques étrangères, la préoccupation numéro 1 de l’ordre public.

        Pour un ancien acteur des services de l’État à Paris, il est difficile de ne pas se poser la question de l’« empiètement » continu de la collectivité publique « locale » sur les pouvoirs de l’État dans la capitale.     

       La nouvelle configuration institutionnelle des années 80 posait déjà de redoutables problèmes de cohabitation, de coopération, et naturellement de conflit de pouvoir avec l’Etat, mais tout a changé.

       Le « système parisien » tel que je le décrivais était doté d’une puissance politique exceptionnelle, à laquelle Chirac ajouta un volet de Com’ » à la « papa » qui n’avait rien à voir avec la « Com’ » du jour, grâce aux réseaux sociaux et aux nouvelles Tech. (« Paris un Etat dans l’Etat »(1993) – « La méthode Chirac  »(1997).

            Au cours des dernières années, et sous réserve d’un audit sérieux, il semble que la majorité municipale actuelle de gauche de type « Bobo », une gauche de marque « libertaire », mâtinée de grand capitalisme international et d’associations multiculturelles en tout genre et sans contrôle, ait de plus en plus imposé ses manières de gestion politique et ses pouvoirs à l’Etat.

       C’est en tout cas l’impression générale que la gestion municipale actuelle laisse à l’observateur, un parti-pris multiculturel très gaillard qui échappe  de plus en plus au passé national de notre capitale, la recherche avant tout du bonheur d’une intelligentsia de plus en plus influente, sachant fort bien utiliser les pouvoirs des nouvelles Tech, et donnant les quelques gages d’ouverture sociale qui conviennent à une majorité municipale de gauche.

             Après la « caste «  de la « chiraquie », une autre « caste » ?

            La majorité municipale a en effet forcé la note,  en pratiquant une politique d’accueil laxiste des migrants étrangers, femmes ou mineurs isolés, souvent clandestins, et en menant une politique très coûteuse de diversification sociale en matière de logement, deux axes qui ont eu pour résultat d’aggraver l’insécurité des parisiens et d’alourdir très sérieusement la dette de la collectivité parisienne, c’est-à-dire celle du contribuable parisien, plus de 7 milliards d’euros.

           Avec ce lourd héritage de la dette, il est évident que l’avenir de la Ville est déjà lourdement hypothéqué. Traditionnellement, la Ville de Paris bénéficiait d’une dette faible due en grande partie  au trésor de guerre que constituait sa richesse économique et fiscale, comparée à celle des grandes villes de banlieue, ce qui n’est plus le cas : cette situation constitue une grave hypothèque sur les investissements à venir.

            Dans le domaine du logement et de la spéculation immobilière, il n’y a guère d’autre solution que la limitation ou le contrôle des acquisitions par  l’étranger, et l’interdiction absolue de donner une vocation hôtelière aux appartements.

            L’impression aussi de l’amateurisme nouveau de la gestion municipale, à voir la façon dont le Vélib a été géré, l’incursion anarchique des trottinettes, les chantiers ouverts  partout, l’organisation des journées sans voiture, sans que la Ville fasse le nécessaire pour que les contrôles d’accès soient effectués dans les conditions légales exigées…

         Amateurisme d’autant plus surprenant que la Ville dispose de services traditionnellement puissants et compétents, et d’autant plus encore que les services des cabinets des élus sont pléthoriques.

        Le dossier des relations entre une collectivité locale qui a la chance d’être le siège  des grandes institutions de la République Française et l’État doit être rouvert, afin de trouver, non pas un équilibre, mais une nouvelle configuration entre les deux pouvoirs adaptée au temps présent.

Relations entre la Ville de Paris et les Banlieues

         Au fil des années, et compte tenu de sa ligne Bobo, la commune de Paris a tendance à considérer qu’elle peut exercer tous les pouvoirs,  sans se soucier des habitants des Banlieues, notamment en ce qui concerne la circulation, l’accès ou la traversée de la capitale, et le stationnement, quel que soit le motif du déplacement, alors que cette fréquentation s’effectue généralement au profit de Paris.

         « L’octroi Hidalgo » ! Est-ce du social ? Non, trois fois  non ! La création de nouveaux « octrois » comme il en existait sous la monarchie !

       L’équipe municipale actuelle rétablit de nouveaux octrois pour accéder à Paris, la tranquillité d’un Paris Bobo privilégié étant assurée au détriment des habitants de banlieue dont le niveau de vie est inférieur à celui des Parisiens, qui viennent travailler dans la capitale, un comble pour une équipe municipale de gauche !

       La Ville a « privatisé » à son profit les « voies sur berge », entrées en quelque sorte dans le domaine privé de la capitale, sans que, ni l’Etat, ni les collectivités voisines, ne puissent s’y opposer ( ?) et trouver un accord évitant leur neutralisation permanente, sous l’étendard ambigu du CO2.

        En ce qui concerne les relations institutionnelles entre Paris et ses banlieues, l’évolution passée n’a pas brillé par sa simplicité et sa clarté : le mille-feuille de l’agglomération parisienne s’est enrichi d’une couche nouvelle avec une métropole dont personne ne saisit l’utilité entre les départements et la région Ile de France.

       La situation actuelle de Paris et de l’agglomération parisienne n’a plus rien à voir avec celle des années 70-80, notamment dans le domaine de la paix civile : l’équipe municipale actuelle gère ses relations avec l’État en tentant en permanence de faire porter le chapeau à l’État, alors que c’est elle qui prend les initiatives déstabilisantes.

Avant d’être une collectivité locale, Paris est la capitale de la République Française !

Point à la ligne républicaine !

&

Un clin d’œil littéraire binational

Avec  Miguel de Cervantès Saavedra dans « L’ingénieux hidalgo Don Quichotte de la Manche » et Sancho Panza

Avec Jean de La Fontaine dans la fable « La grenouille qui veut se faire plus grosse que le bœuf »

            Dans une fable relativement brève, Jean de La Fontaine décrit l’ambition de la grenouille à vouloir « égaler l’animal en grosseur »

            Disant : « Regardez bien, ma sœur,

          Est-ce assez ? Dites-moi : n’y suis-je pas encore ?

          Nenni.- M’y voici donc ?- Point du tout.- M’y voilà ?

       Vous n’en approchez point. » La chétive pécore s’enfla si bien qu’elle creva.

            Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages :

       Tout Bourgeois veut bâtir comme les grands Seigneurs,

       Tout petit Prince a des Ambassadeurs,

            Tout Marquis veut avoir des Pages. »

&

Dans son récit plein d’aventures avec ses deux héros, Don Quichotte et Sancho Panza, (chapitre XLII, page 842, Garnier Frères-1961), Don Quichotte donne de précieux conseils à son ami Sancho Panza qui vient d’être nommé gouverneur d’une île :

            « Premièrement, ô mon fils, garde la crainte de Dieu, car dans cette crainte est la sagesse, et, si tu es sage, tu ne tomberas  jamais dans l’erreur.

            Secondement, porte toujours les yeux sur qui tu es, et fais tous les efforts possibles pour te connaître toi-même : c’est la plus difficile connaissance qui se puisse acquérir. De te connaître, il résultera que tu ne t’enfleras point comme la grenouille qui veut s’égaler au bœuf. »

&

Un clin d’œil stratégique et chinois avec le sinologue François Jullien dans la « La propension des choses » « Pour une histoire de l’efficacité en Chine »

            Dans ce livre, François Jullien décrit le processus stratégique qui découle des concepts de « disposition » et de « propension des choses », une thématique familière à la pensée chinoise.

            « Le potentiel naît de la disposition (p,25)

            « … tout l’art de la stratégie peut être réexprimé plus précisément à travers lui : dire que l’ « adresse » à la guerre « repose sur le potentiel né de ladisposition » (che) signifie que le stratège doit viser à exploiter à son avantage, et selon leur maximum d’effet, les conditions rencontrées. Comme image idéale de ce dynamisme découlant de la configuration qu’il faut capter, celle du cours d’eau : si l’on ouvre une brèche à de l’eau accumulée en hauteur, celle-ci ne peut que se ruer vers le bas ; et dans son élan impétueux, elle charrie jusqu’aux galets. Deux traits caractérisent, à partir de là un telle efficience : d’une part, elle n’advient qu’à titre de conséquence, impliquée par une nécessité objective ; et, de l’autre, elle est irrésistible, compte tenu de son intensité » (p,25,26)

Tout au long d’une longue histoire, et de nos jours encore, la position de Paris, continue à illustrer, à l’évidence, la configuration stratégique d’une  « disposition » exceptionnelle à la « propension des choses » née de son « potentiel », telles que l’auteur les décrit.

                  Jean Pierre Renaud   –  Tous droits réservés

SUBVERSION ET POUVOIR – Le nouveau théâtre d’opérations

II – Le nouveau théâtre d’opérations des subversions

            Depuis les années 1970, la France a beaucoup changé, mais paradoxalement, une partie de ses élites continue à faire comme si notre pays pouvait assumer une puissance capable de faire concurrence aux grandes puissances du monde et à refuser de voir les réalités de la France d’aujourd’hui.

            Les traits principaux de ce théâtre d’opérations :

            Tout d’abord, un théâtre ouvert à tous les vents, mais avec quelles caractéristiques ?

            De retour dans son pays natal, après près de cinquante ans, un Français ne reconnaitrait plus sa terre natale !

             Au regard, il la trouverait très colorée, avec des minorités venues de l’outre-mer français, africain, ou maghrébin.

          Dans les années 70, le pays ne comptait pas ou peu de quartiers dits sensibles, alors que de nos jours, il en compterait plusieurs centaines, le résultat d’une immigration mal contrôlée et d’une incapacité nationale à réussir à l’intégrer.

         Résultat, un développement du multiculturalisme qui vient en concurrence avec un horizon national qui fut difficile à construire au fil des siècles, une obsession nouvelle pour le culte des origines et de leur mémoire ou histoire, vraie ou falsifiée, l’expansion d’un Islam dont certaines formes d’expression ne sont pas compatibles avec notre état de droit et nos mœurs, face à la déchristianisation de la France.

      Dans ce méli-mélo démographique, culturel, et religieux, le fric a gagné beaucoup d’idoles, face à l’amollissement, pour ne pas dire le laisser-aller ou le vide de beaucoup de nos règles de vie commune, un état de droit toujours avancé en posture politique, mais qui masque la perte du sens du bien commun et de la paix civile, ou qui sert de couverture ou d’excuse aux délinquants de toute espèce.

         Trop plein de fric, mais au moins autant trop plein d’images, saturation de l’espace social par le médiatique, le trop plein des réseaux sociaux, un champ libre pour toutes les propagandes, les falsifications, c’est à dire les subversions potentielles ou concrètes, avec souvent d’insidieux détours.

       Comment ne pas faire appel à Pascal et à son concept de « divertissement » pour interpréter tous ces « détours » qui nous font oublier les réalités et les problèmes du jour, tout autant que ceux du moyen et long terme ?

          L’esprit collectif est en sérieuse perte de vitesse !

         Adulte ou adolescent, je peux être sous l’influence de tel ou tel réseau social, et me croire autorisé de nos jours à assassiner les infidèles, à être le terroriste de service, pour tuer ou estropier les non-musulmans ou les musulmans, un passage presque naturel de l’image et de la parole à l’acte !

       La connaissance des stratégies indirectes, de leurs processus de manipulation, souligne l’importance de l’identification des lignes d’attente de l’opinion, de leur carte, fortes ou faibles, constantes ou épisodiques, apparentes ou masquées, de quelle nature ?

          Lignes d’attente religieuse, culturelle, ou laïque ? Lignes d’attente politique, européenne ou nationaliste ? Lignes d’attente économique, libérale ou étatique ? Lignes d’attente sociale, protectionniste ou responsable ? Lignes d’attente de sexe ou de paradis artificiels, d’évasions, de transgressions…

          Beaucoup d’ONG s’inscrivent volontiers sur une ligne d’attente de générosité sans compter, en oubliant que leur action, ou leur dévouement, nourrit le risque d’une assistance « perpétuelle », qui empêche les pays donataires d’assumer leurs responsabilités.

              Lignes d’attente de l’opinion publique de court terme ou de long terme, et des comportements : une société du fric et de la consommation ? Une société  ouverte ou fermée ? Une société en proie au multiculturalisme et de plus en plus soumise au postulat du « toutes chose étant égales par ailleurs » qu’il s’agisse de nos libertés individuelles et politiques, des droits de l’homme, de la démocratie ou de la théocratie ?

         Afin d’identifier les lignes d’attente favorables à telle ou telle subversion, il est capital d’en dresser une carte fidèle et actualisée.

          Dans le livre de François Jullien cité plus haut, ce dernier propose une analyse des « lignes de vie au travers du paysage » familières à la pensée chinoise.

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés

SUBVERSION ET POUVOIR ?

Les subversions ? Les manipulations ! Le grand désordre !

Une esquisse d’éclairage sur les processus de renversement de l’ordre républicain.

&

Cette chronique sera publiée au fur et à mesure des jours

Sommaire

En prologue – La France est-elle l’objet d’une subversion ?- Le nouveau théâtre d’opérations des subversions –  Les machineries du théâtre d’opérations – Les « modèles de propagande » – Trucs et truquages – Le modèle de propagande des « raisins verts » : mémoire ou histoire ? – Face à ces défis.

&

« En plein jour, je l’abuse par le jeu des drapeaux et des étendards, et, le soir, je l’égare par des battements de tambour. Alors, tremblant de frayeur, il divisera ses forces par mesure de précaution. »

 Sun Tzu

La parabole des « raisins verts »

          En prologue     

         Pourquoi ces réflexions sur la situation de la France face à une subversion multifactorielle, fruit d’un ensemble de manipulations de toute nature, intellectuelle, politique, religieuse, sociale, économique, historique, et de nos jours médiatique, dont l’objectif est une prise de pouvoir ?

            Subversion au singulier ou subversions au pluriel ?

            A l’occasion d’un  commentaire des positions mémorielles de M.Stora, j’ai fait appel récemment à la référence biblique des « raisins verts » et cette appellation singulière me parait justifiée, compte tenu du rôle médiatique très troublant que ses membres, la plupart issus du sillon maghrébin, ont joué dans cette nouvelle forme de subversion multiculturelle, en tant qu’enfants d’acteurs ou de témoins des situations coloniales dénoncées, algériennes avant tout, en investissant avec un certain succès le mémoriel, médiatique, et politique (blog du 3 avril 2016).

            Dans le livre « Le choc des décolonisations », l’historien Pierre Vermeren utilise à ce sujet l’expression de « matrice algérienne », et nous y reviendrons plus loin dans l’analyse du théâtre d’opérations.

            Très tôt, j’ai été sensibilisé aux thématiques de la subversion, pour avoir lu, entre autres, les « Œuvres Choisies » de Mao-Tsé-Tung, m’être intéressé aux guerres révolutionnaires, subversives, marxistes, ou tiers-mondistes, celle notamment du Vietminh, puis à celle que j’ai « fréquentée », si je puis dire, en Algérie, dans les années 1959-1960.

            J’ai eu, en particulier, l’occasion de comparer à la fois sur le plan intellectuel et sur le terrain, les théories de la guerre subversive exposées par le colonel Trinquier et, d’une façon moins convaincante, par le capitaine Galula, en notant la faiblesse d’une partie des analyses et recommandations stratégiques, notamment en raison d’une compréhension erronée des objectifs de cette subversion que l’on combattait, l’objectif numéro Un de ce type de stratégie étant la conquête de la population, et la prise de pouvoir grâce à son soutien effectif.

            Afin de mieux connaître les tenants et aboutissants de la subversion en général, ou de telle ou telle subversion en particulier, il convient de s’intéresser au contenu des stratégies militaires et politiques, indirectes et directes, celles anciennes, décrites par Sun-Tzu, ou par Clausewitz, et celles modernes analysées par Beaufre, Gambiez, ou Liddell Hart.

           Les domaines de l’information et de la propagande font évidemment l’objet des stratégies indirectes de manipulation, telles celles décrites par Chomsky dans le livre « La fabrique de l’opinion publique » (1988).

        Plus largement et en profondeur, le philosophe et sinologue François Jullien a décortiqué les chemins stratégiques proposés dans la philosophie chinoise, avec les concepts de « potentiel », de « position », de « disposition », de « propension », ou autres chemins de « détour », notamment dans le livre « La propension des choses- Pour une histoire de l’efficacité en Chine ».

          Le chapitre 2 de cet ouvrage analyse la proposition : « La position est le facteur dominant (en politique). », en notant qu’il s’agit d’un des sujets majeurs de toute analyse stratégique, d’où l’importance des positions que sont susceptibles de prendre les subversions, bonnes ou mauvaises.

      Pourquoi ne pas citer l’exemple actuel d’un Qatar théocratique, lequel, en prenant le contrôle du PSG, avec la complicité de notre Establishment de gauche et de droite, bénéficie de l’aura et de l’image de la capitale de la République Française ?

            Il y a près de vingt ans, j’avais commis un petit livre d’analyse et de réflexion, intitulé « Chemins Obliques », sur les différents champs d’application des stratégies indirectes, dont le contenu avait alors intéressé le général Gambiez, que j’avais rencontré.

            A la page 108, j’avais noté que quel que soit le champ d’études retenu : « Nous ne sommes jamais très loin du champ des stratégies indirectes. »

            L’ouvrage passait en revue tous les domaines de notre vie, qui au-delà de la guerre, pouvaient être l’objet d’une stratégie indirecte, c’est-à-dire de toutes les tromperies, de processus insidieux, en ce qui concerne la politique nationale ou internationale, l’information, l’art, ou l’amour…

            Il n’est pas inutile de rappeler que dans l’attaque directe, votre adversaire tente de vous vaincre, à titre principal, dans un face à face, à visage découvert (Verdun 1916), alors que dans l’attaque indirecte, il tente de vous vaincre en vous déstabilisant, à visage à la fois découvert et masqué, à front renversé (Vietminh ou FLN).

Jean Pierre Renaud  –  Tous droits réservés

« Français et Africains ? » Frederick Cooper – Conclusions générales- 2ème Partie

« Français et Africains ? »

Frederick Cooper

Conclusions générales

&

II

Les acteurs de la décolonisation
Qui furent les acteurs de ce processus ? Les vrais acteurs ?

          Dans la première partie consacrée à la description, à grands traits, du contexte international et français, puis de la situation coloniale qui était celle de l’AOF en 1945, nous avons pu en mesurer la très grande complexité.

         Comment situer exactement les interlocuteurs, puis les négociateurs de la décolonisation ?

            D’entrée de jeu, je serais tenté de faire le constat du même désintérêt des peuples concernés par le sujet, aussi bien en métropole qu’en AOF pour des raisons évidemment très différentes.

       En France, l’opinion publique était plutôt indifférente, et en AOF, il n’existait pas encore d’opinion publique, sauf dans les villes.

      La négociation était donc laissée entre les mains de quelques experts, politiciens ou techniciens, évidemment plus nombreux en métropole.

    En métropole

     Les dirigeants africains avaient en face d’eux la machinerie politique et étatique puissante d’une métropole capable d’étudier et de mesurer au jour le jour le contenu et les effets éventuels de telle ou telle disposition institutionnelle, dans une négociation complexe dont l’ambition était de fonder les nouvelles relations entre la France et l’outre-mer, mais il ne s’agissait pas uniquement de l’AOF, ou même de l’AEF, c’est-à-dire de l’Afrique noire, car cette mise à jour supposait de résoudre de nombreux casse-têtes liés aux composantes très diverses de ce qu’on appelait encore l’empire, transformé rapidement en une Union Française dont la nature institutionnelle était loin  d’être claire, et dont la vie fut celle d’une comète.

       Dans ce type d’analyse, il ne faut jamais oublier trois des facteurs qui comptaient pour la métropole, les relations humaines et souvent personnelles qui liaient certains des acteurs,  l’importance de l’outre-mer pour le prestige du pays, avec toujours ce reviens-y de grande puissance, et la question des gros sous.

       Deux ministères  étaient compétents, celui des Affaires Etrangères et celui de la France d’Outre-Mer, pour l’Afrique noire, mais avec une instabilité ministérielle importante.

       Furent en fonction les ministres de la France d’Outre- Mer suivants, issus de la SFIO ou du MRP, Moutet (46-47), Coste-Floret (47-49), Teitgen, Colin, et Buron.

       Les hommes politiques compétents sur ces sujets n’avaient jamais été nombreux, et ils ne l’étaient pas plus après 1945.

      Il convient de rappeler que Mitterrand, membre d’une petite formation du centre, l’UDSR, fut ministre de la France d’Outre-Mer de décembre 1950 à novembre 1951, et que son passage à la rue Oudinot, fut marqué par un changement de politique à l’égard du RDA d’Houphouët-Boigny, un dirigeant africain avec lequel il avait noué des relations personnelles de confiance.

       Un exemple des relations personnelles qui eurent souvent beaucoup plus d’importance que les négociations officielles, et une fois revenu au pouvoir, de Gaulle confia à Foccart la responsabilité de nouer et de maintenir un solide réseau de relations personnelles avec tous les dirigeants de la nouvelle Afrique indépendante, devenu ce qu’on a appelé la Françafrique.

       Une fois de Gaulle revenu au pouvoir en 1958, ce fut quasiment toujours son Premier Ministre qui mena le bal, mais sur les directives de de Gaulle qui avait des idées assez claires sur la décolonisation, et pour lequel les colonies ne constituaient pas une nouvelle « ligne bleue des Vosges ».

        Il convient de noter enfin que, quasiment tout au long de la période de la décolonisation, les dirigeants politiques africains étaient affiliés aux partis de la Quatrième République, le MRP, la SFIO, ou le Parti Communiste.

       En Afrique Occidentale Française

       Les dirigeants africains, ceux d’AOF, nouvellement élus au Parlement, à l’Assemblée Nationale et au Conseil de la République, négocièrent pied à pied au sein des différentes commissions qui se succédèrent pour doter la France d’une première Constitution, celle de la Quatrième République, puis celle de la Cinquième République, celle du général.

       Il est évident que leur passage dans les grandes institutions parlementaires, puis ministérielles, donnèrent à quelques-uns de ces dirigeants africains une grande expérience politique en même temps qu’une précieuse connaissance du système politique français qui n’avait pas grand-chose à voir avec l’ancien système colonial qu’ils retrouvaient souvent inchangé, chaque fois qu’ils revenaient dans leur pays.

       En même temps, pourquoi ne pas noter que leurs nouvelles responsabilités .ou fonctions ministérielles les éloignaient des aspirations de la grande majorité de leur corps électoral qui découvrait au fur et à mesure des années, de 1946 à 1960, les attraits d’un suffrage universel qui ne s’inscrivait pas dans la plupart des traditions de sociétés africaines majoritaires de la brousse ?

      Une sorte de jour politique à Paris et de nuit en Afrique !

      Nous avons brièvement décrit plus haut quelques contours de la minorité africaine des évolués, des lettrés, des acculturés, qui animait la scène africaine, composée de fonctionnaires et de salariés, habitant dans les villes côtières, et prioritairement au Sénégal.

         Les nouveaux dirigeants africains étaient issus de cette sorte de nouvelle caste africaine dont le grand lettré Hampâté Bâ avait fort bien décrit les strates de la nouvelle société africaine, grand témoin de l’histoire d’en-bas, pour emprunter un terme bien malheureux en vogue dans un des  courants de chercheurs postcoloniaux.

       Citons un passage du livre  « OUI MON COMMANDANT » d’Amadou Hampâté Bâ :

    « Sous l’effet de la colonisation, la population de l’Afrique occidentale française s‘était        divisée automatiquement en deux grands groupes, eux-mêmes subdivisés en six classes qui vinrent se superposer aux classes ethniques  naturelles. Le premier était celui des citoyens de la République Française, le second, celui des simples sujets.

       Le premier groupe était divisé en trois classes : les citoyens français pur-sang, nés en France ou Européens naturalisés français ; les citoyens des « quatre communes de plein exercice » du Sénégal (Gorée, Saint louis, Dakar et Rufisque) ; enfin les Africains naturalisés citoyens français. Tous jouissaient des mêmes droits (en principe) et relevaient des tribunaux français.

       Le second groupe, celui des sujetscomprenait à son tour trois classes : au sommet de la hiérarchie venait les sujets français du Sénégal, qui jouissaient d’une situation privilégiées par rapport à ceux des autres pays et auxquels on évitait de se frotter, par peur des répercussions judiciaires ou politiques ; puis venaient, dans les autres territoires, les sujets français « lettrés » (c’est-à-dire scolarisés ou connaissant le français) et les sujets français « illettrés » uniquement du point de vue français, cela va de soi.) » (p,187)

        Trois dirigeants africains s’illustrèrent dans le processus de cette décolonisation, les trois auxquels l’auteur donne d’ailleurs largement la parole, Senghor, Houphouët-Boigny, et Modibo Keita.

       Le premier, Senghor,  s’était illustré par un parcours universitaire exceptionnel. Fait citoyen français en 1933, élève de l’Ecole Normale Supérieure, dans la même promotion que Georges Pompidou, il fut le premier Africain agrégé de grammaire. Membre de la SFIO, élu député en 1945, ministre d’Edgard Faure en 1955, puis de de Gaulle entre le 23/07/1959 et le 19/05/1961.

        Senghor avait la particularité d’être de confession catholique dans un Sénégal très majoritairement musulman, au sein duquel la congrégation des Mourides de Touba jouait un grand rôle religieux et politique.

       Les deux autres dirigeants étaient issus de l’Ecole William Ponty, une école normale créée en 1903, d’abord pour former des instituteurs et des interprètes, la pépinière de la plus grande partie des cadres qui ont servi leur pays avant et après l’indépendance.

       Houphouët- Boigny était un médecin auxiliaire formé à William Ponty, issu d’une des grandes ethnies de l’ouest africain, les Baoulés. En 1938, il prit la tête de le chefferie des Akoué. En 1944, il fonda le syndicat des planteurs ivoiriens, un syndicat qui devint le fer de lance de son action politique en Côte d’Ivoire.

      Elu député en octobre 1945, il fonda le RDA (Rassemblement Démocratique Africain), affilié jusqu’en octobre 1950, au Parti Communiste Français. A cette date, il rejoignit les rangs de l’UDSR de Pleven et Mitterrand, un  des partis charnières de la Quatrième République.

       De 1956 à 1958, il fut ministre dans trois des derniers gouvernements de la Quatrième République, puis ministre du général de Gaulle, dans les gouvernements Debré, de 1958 à 1961.

        Modibo Keita, instituteur formé à l’Ecole William Ponty (1935), devint un des premiers dirigeants à la fois de son syndicat d’enseignants au Soudan, le Mali, et du nouveau parti politique RDA.

        Il fut Secrétaire d’Etat en 1957-1958 dans deux des derniers gouvernements de la Quatrième République.

        Quels acteurs pour Frederick Cooper ?

      Après avoir brossé rapidement les traits des acteurs du processus de décolonisation qu’a l’ambition de décrire Frederick Cooper, revenons à quelques-unes de ses propres citations qui concernent ces mêmes acteurs, afin d’en questionner la pertinence.

       «  Nous pouvons facilement ne pas comprendre les démarches suivies par les acteurs politiques. Nous savons que certaines conduisaient à des impasses ; les personnes concernées l’ignoraient. Ce livre explique pourquoi, en 1960, la France et l’Afrique Occidentale française se sont retrouvées avec une forme d’organisation politique dont ni l’une ni l’autre n’avaient voulu durant la majeure partie des quinze années précédentes. » (p15)…

       « La meilleure façon selon moi de dépasser cette situation est de se concentrer non pas sur les arguments de 2014, mais sur ceux de la période 1945-1960 ; non pas à ce que nous pensons aujourd’hui que les peuples auraient dû dire dans la situation coloniale, mais à ce qu’ils dirent, écrivirent et firent réellement ; non pas à la logique supposée immanente de types de régimes politiques pré-identifiés, mais aux concessions faites par les acteurs politiques en ces temps de profondes incertitudes, aux mots et aux actes de gens qui tentaient de déterminer ce qu’ils voulaient et ce qu’ils pourraient éventuellement obtenir. » (p,15

      Nous avons surligné en gras les mots et concepts qui à nos yeux laissent planer une grande incertitude sur ce type d’histoire racontée.

      Que signifiait alors le mot de peuple en France et en Afrique de l’ouest ?

       Plus loin, l’auteur écrit :

     « D’importants activistes politiques  africains affirmaient que chaque unité territoriale au sein de la France devait être en mesure d’exprimer sa « personnalité ». (p,21)

      Qui donc précisément ? « Activistes » ou acteurs ?

       L’auteur reprend la même expression à la page 37 :

      « Les pages qui suivent retracent les efforts déployés par les activistes politiques et sociaux d’AOF pour obtenir l’équivalence sociale et économique – mais aussi politique – de tous les citoyens et pour rechercher dans le même temps la reconnaissance de la distinctivité culturelle et le droit à l’autonomie politique au sein d’une communauté française élargie. »

       S’il s’agit des interlocuteurs cités le plus souvent par l’auteur, très bien, mais il est dommage qu’il ne les ait pas situé dans leur parcours de vie et dans le contexte des pays dont ils étaient les représentants « éclairés ».

        « Leurs arguments se voyaient opposer des objections d’ordres pratiques et subjectifs de la part d’élites métropolitaines qui considéraient comme une évidence leur propre supériorité en matière de gouvernance. «  (p,21)

      Question : les « élites métropolitaines » vraiment ?

       S’agit-il d’histoire ? Avec quelle justification statistique ? Histoire ou littérature ? A mon humble avis, pure littérature !

       A lire le texte de l’auteur, il est assez difficile de bien situer le contexte économique, politique, culturel, et social dans lequel les dirigeants africains négociaient pour le compte d’un petit nombre de personnes qui découvraient ce que pouvait être la citoyenneté.

     Pourquoi ne pas rappeler que la presque totalité de ces « activistes » faisaient partie d’une Afrique satellite du monde politique et syndical français, la SFIO, le PC, la CGT ?

   Les connexions, un concept cher à l’auteur, et qui auraient mérité d’être analysées, se situaient d’abord à ce niveau, d’autant plus que les connexions de type capitalistique entre la France et l’AOF manquaient de ressort, tout en étant tout à fait marginales ?

     Ces dirigeants africains étaient élus, c’est vrai, mais il est honnête de rappeler qu’ils étaient élus par une toute petite minorité d’électeurs, de la faute ou non de la puissance coloniale. Nous avons proposé plus haut quelques chiffres d’électeurs ;

       Dans les années 1945-1946, et même jusqu’en 1960, quelle était la signification d’une élection en Afrique Occidentale ?

        Dans des cultures encore fortement imprégnées de traditions d’obéissance aux chefs religieux ou traditionnels, chez des peuples dont l’immense majorité était encore illettrée et dont l’information, quand elle existait, était avant tout orale.

      La côte n’était pas représentative du monde africain.

     Même au Sénégal, terrain d’études privilégié par l’auteur qui décidait ? Qui élisait ? La confrérie musulmane des Mourides, comme l’indique d’ailleurs l’auteur à la page 417 ? Dont la puissance coloniale avait recherché le soutien ? Qu’elle avait d’ailleurs obtenu.

            Ou ailleurs, au Dahomey ou au Togo, les missions chrétiennes, autre connexion agissante, que l’auteur n’évoque pas ? Ou encore les notables ; chefs ou non ?

            Ou encore, et effectivement, l’administration coloniale qui n’avait pas obligatoirement mauvaise presse, comme le laissent entendre de nos jours, une certaine presse et édition postcoloniales ?

       L’auteur cite à juste titre le cas du Niger à l’occasion du référendum de 1958 (p,338), mais cet exemple est un des rares exemples de l’ancienne AOF, où la puissance de la France pouvait être mise en cause avec les mines d’uranium, étant donné que de Gaulle avait l’ambition de disposer de l’arme atomique, le nouveau critère des grandes puissances.

       En résumé, l’immense majorité des nouveaux électeurs d’Afrique noire ne savaient sans doute pas ce que signifiaient les nouveaux concepts savants de citoyenneté ou d’indépendance, dans le sens que nous leur donnions en Europe.

III

Les scénarios de la décolonisation en AOF
Ou les dirigeants français et africains avaient-il le choix ? Une stratégie ?

            L’auteur a déclaré tout au début de son livre «  Ceci est un livre sur la politique » (p,9), mais après avoir lu et relu cet ouvrage, la première question qu’il est possible de se poser est celle de savoir s’il ne s’agit pas tout autant d’un livre « politique ».

        Tout au long d’une analyse très détaillée, peut-être trop, l’auteur tente de nous persuader que la décolonisation de l’Afrique Occidentale Française aurait pu se dérouler sur un tout autre scénario que celui de l’histoire réelle.

       Dans son introduction (p,38), l’auteur  écrit :

         «  C’est uniquement en rejetant nos hypothèses sur ce que doit être un récit de libération nationale que nous comprendrons les ouvertures, les fermetures et les nouvelles possibilités telles que les perçurent les gens et en fonction desquelles ils cherchèrent à agir. »

       Dans sa conclusion, l’auteur revient à maintes reprises sur le fait que d’après lui, rien n’était joué au départ dans le processus concret de la décolonisation :

       « Le spectre d’idées utilisées par les acteurs politiques de la France africaine et de la France européenne dans leur approche de la politique entre 1945 et le début des années 1960 était bien plus large que la dichotomie entre empire colonial et Etat-nation indépendant » (p,443)

      « Si l’on croit dès le départ au grand récit de la transition globale à long terme, de l’empire vers l’Etat-nation, on peut aussi bien passer à côté de la question qui ouvre ce paragraphe. » (p446)

      « Pourtant, en 1958, d’autres possibilités restaient ouvertes » (p,447)

     Est-ce que le terme même de « spectre », c’est-à-dire de choix, n’était pas effectivement un  fantôme ?

     Est-ce que l’histoire politique telle que la raconte Frederick Cooper pouvait fonctionner, concrètement, autrement ?

      Comme je l’ai déjà indiqué, le lecteur pourra être surpris de voir la réflexion et l’analyse d’un tel ouvrage non reliée au contenu du livre « Le colonialisme en question » avec sa trilogie conceptuelle, identité, modernité, globalité.

        C’est peut-être dommage car le passage au crible du processus décrit par l’auteur avec les trois filtres identité, modernité, globalité auraient peut être conduit à une autre analyse étroitement raccordée aux situations historiques et à leur chronologie.

      La trajectoire historique?

      La première critique de fond qui peut être portée à l’encontre de ce postulat est le fait que toutes les discussions, controverses, hypothèses proposées par l’auteur auraient eu pour point de départ l’année 1945, sans tenir aucun compte de la « trajectoire » historique qui était celle de l’Afrique occidentale, pour ne pas parler des autres territoires, depuis le début de la colonisation, en gros une cinquantaine d’années auparavant.

       Une analyse qui ferait  table rase de l’histoire de ces territoires ?

       Avant d’articuler nos propres conclusions à partir des concepts d’analyse séduisants que propose l’auteur, les trajectoires, les connexions et interconnexions, les limitations, pourquoi ne pas résumer brièvement la description des caractéristiques des théâtres de la métropole et de l’AOF, et de leurs acteurs ?

        Moment et situation – Que de quadratures du cercle à résoudre !

        Une métropole ruinée par la guerre, aux prises avec beaucoup de dossiers économiques, financiers, politiques et sociaux insolubles, aux prises avec d’autres dossiers coloniaux dont l’importance dépassait très largement celle de l’AOF, un territoire marginal pour un pays qui vivait aux crochets des Etats Unis….

      Alors que la France se débattait avec des dossiers autrement importants pour ses destinées internationales et nationales, la guerre d’Indochine, le devenir d’une Algérie, dite encore française, et le nouvel horizon européen !

      Dans un contexte de guerre froide, mondial et colonial, instable, dominé par les deux puissances antagonistes des Etats Unis et de l’URSS.

     Une AOF enfin ouverte, mais seulement en partie, vers le monde extérieur de l’Atlantique (modernité et globalité)), mais d’une superficie immense, faiblement peuplée, composée d’un patchwork de religions, de peuples et de cultures (identité).

       Faute de moyens financiers et d’atouts naturels, la colonisation n’avait réussi à faire accéder à une modernité relative  qu’une petite partie de la population, essentiellement celle des villes côtières, avec le rôle de monopole qu’exerçait la capitale de Dakar.

        Enfin, il parait difficile dans ce type d’exercice historique de faire l’impasse sur le volet économique et financier des relations existant entre la métropole et l’AOF, qui ne furent pas exactement celles qu’a décrites Mme Huillery dans sa thèse. (voir mes analyses de cette thèse sur ce blog).

      Les acteurs – Comme nous l’avons vu, les acteurs de métropole disposaient d’une grande supériorité d’expertise, mais les politiques n’étaient pas majoritairement concernés par les problèmes coloniaux, sauf en cas de guerre, comme ce fut le cas en Indochine, puis en Algérie.

       Le dossier AOF venait de toute façon très largement derrière les autres dossiers coloniaux, et pourquoi ne pas dire déjà, qu’avec le début de la guerre d’Algérie, succédant à celle d’Indochine, les gouvernements avaient pour souci principal de ne pas voir de nouveaux fronts s’ouvrir en Afrique noire.

        En AOF, nous avons relevé que les acteurs du processus de la décolonisation ne représentaient qu’une petite minorité d’évolués, et que les grands concepts auxquels l’auteur attache de l’importance, la citoyenneté, le suffrage universel, les Etats-nations, les fédérations, confédérations, ou communautés ; n’avaient pas beaucoup de sens dans la plus grande partie de l’hinterland africain.

       Dans une chronique annexe que nous publions, un bon connaisseur de cette AOF de l’époque, M. Roger de Benoist, a intitulé la conclusion de son livre « L’Afrique occidentale française » : « L’indépendance des notables ».

       Ce bref résumé marque déjà quelques-unes des limitations capitales auxquelles il avait été difficile d’échapper dans un processus qui n’avait pas débuté en 1945.

       Trajectoire avant 1945, et trajectoires après 1945 ?

       L’auteur s’attache à décrire le processus constitutionnel et politique de la décolonisation qui a débouché sur l’indépendance des anciennes colonies de l’AOF, en tentant de nous convaincre que la trajectoire formelle, celle qu’il décrit, aurait pu être différente de la trajectoire réelle, l’historique.

        Une sorte d’histoire hors du sol et hors du temps, avec un éclairage qui donne tout son éclat à la magie du verbe, celle qui rendit célèbre le poète Senghor, un des héros de cette joute oratoire dont les concepts passaient très largement au-dessus de la tête des peuples concernés, quoiqu’en pense l’auteur lorsqu’il écrit par exemple :

     «  Les mots « Etat », « souveraineté », et indépendance » s’entendaient sans cesse en Afrique, et la fédération restait une question ouverte. » (p,312)

     Est-ce que la trajectoire réelle n’a pas au contraire fait converger tout un ensemble de trajectoires concrètes telles qu’une relation économique marginale, une pénétration difficile d’un continent jusque- là fermé au monde atlantique, avec une trajectoire de modernité suivant le cours des nouvelles voies de communication de la mer vers l’hinterland, le cloisonnement persistant du bassin du Niger, des trajectoires politiques  qui accordaient le nouveau pouvoir aux populations de la côte, mais d’abord à leurs petites élites ?

       « Position », « disposition », « cours des choses » ? Ou choix politique entre plusieurs stratégies ?

       Pour éclairer ce type de critique, sans doute faut-il tout d’abord se poser la question de savoir si les interlocuteurs du processus de la décolonisation agissaient en fonction d’une politique pour ne pas dire d’une stratégie, mais rien n’est moins sûr, car la France n’a jamais eu véritablement de politique coloniale.

        Peut-être faut-il faire appel à certains concepts stratégiques, tels que « position », « disposition » « point culminant de l’offensive, mis en valeur aussi bien par Sun Tzu que par Clausewitz, et celui de « cours des choses », un cours qui suit, qu’on le veuille ou non le fil de l’eau.

       En Afrique Occidentale, comme dans les autres territoires coloniaux, il y avait bien longtemps que la colonisation française avait atteint ses « limitations », c’est-à-dire son « point culminant ».

      Le sinologue François Jullien a écrit des choses fort intéressantes sur ce type d’analyse stratégique.

      Connexions, interconnexions, réseaux, autonomes ou satellites, trois concepts qui auraient sans doute mérité d’être analysés dans leur contenu historique, parce qu’ils auraient contribué à faire apparaître la réalité des luttes d’influences, de pouvoirs, entre les partis ou les syndicats affiliés à leurs correspondants métropolitains, SFIO, MRP, PCF, CGT ou FO, dont ils furent longtemps des satellites.

       Il est difficile d’analyser le processus de la décolonisation sans tenir compte des connexions politiques, syndicales, en y ajoutant les religieuses, musulmanes fortes dans toute la zone du Sahel et de la savane du bassin du Niger, ou chrétiennes, fortes dans les zones forestières de la côte.

       Réseaux personnels aussi, qui eurent beaucoup d’importance dans le processus lui-même, puis après la décolonisation « officielle » elle-même avec notamment les réseaux Foccart, ceux communément appelés de la Françafrique.

      Senghor n’aurait jamais eu l’audience politique qui fut la sienne, en France, sans le réseau de Normal ’Sup, et l’amitié de Georges Pompidou, et au Sénégal, sans le soutien un peu paradoxal de la confrérie des Mourides, alors qu’il était de confession catholique.

      Autre exemple, celui d’Houphouët- Boigny, médecin, planteur de cacao, grand notable Baoulé, tout d’abord membre du Parti communiste, puis allié de Mitterrand, membre influent de la petite formation politique charnière qu’était l’UDSR, alors que ce dernier était ministre de la France d’Outre-Mer.

      Ce nouveau compagnonnage politique changea la face du processus de la décolonisation en AOF, en réorientant l’ancien RDA vers la recherche de nouvelles formes de coopération avec la France qui n’étaient pas celles de Léopold Senghor ou de Modibo Keita.

       Il parait donc évident que pour l’ensemble de ces raisons, et elles sont très nombreuses, les dirigeants français et africains naviguaient dans un décor mouvant, à la recherche de solutions politiques incertaines et mouvantes, mais dans un cadre international, européen, français, colonial, et africain, qui leur laissaient peu de liberté de manœuvre.

        Pourquoi ne pas dire aussi que tout au long de ce débat, le verbe fut roi, comme sur une scène de théâtre, la seule où il était possible de débattre de scénarios aussi divers, qu’absconds, ou coupés des réalités ?

      Il faut avoir un peu fréquenté l’Afrique pour connaitre l’importance du verbe, et les Français d’aujourd’hui commencent à en faire l’expérience avec une partie des immigrés.

      Car en définitive, il s’agissait de savoir si les Français étaient disposés à devenir des citoyens de seconde zone en Europe ou non, compte tenu des charges financières très lourdes que toute solution d’égalité politique et sociale leur aurait imposées.

       Le vrai scénario n’était-il pas en réalité pour la métropole le suivant ? Comment conserver  un certain prestige international, faire durer une certaine image de grande puissance de la France, en contrepartie des « sous » qu’elle était disposée à sortir de son portefeuille, et dans le cas de l’Afrique noire, faire en sorte que son évolution politique ne vienne pas compliquer encore plus la solution du problème algérien ?

Jean Pierre Renaud – Tous droits réservés

            Comme je l’ai annoncé le 8 septembre 2015,  je publierai dans les semaines qui viennent les témoignages et analyses d’acteurs ou de témoins anciens ou contemporains de la période évoquée : Maurice Delafosse, Roger de Benoist, Sœur Maris-André du Sacré Cœur, Gaston Bouthoul, Herbert Lüthy, Michel Auchère, des contributions à la compréhension du contexte historique du débat relaté.

.

Humeur Tique: Congruence à la chinoise et pacte de compétitivité à la française! Bienvenue au Club France!

Humeur Tique :  

Congruence à la chinoise et pacte de compétitivité à la française !

Congru ou incongru ?

 Bienvenue au Club France !

            Sur ce blog, le 5 octobre 2011, et à l’approche des élections présidentielles de 2012, une chronique était intitulée :

 « Election présidentielle 2012 : une chance historique pour le centre grâce à la congruence » 

Y étaient rappelés  les termes d’une analyse du sinologue François Jullien dans son livre « Le sage est sans idée », d’après laquelle « le milieu véritable, celui de la sagesse… est celui du juste milieu de la congruence qui, comme tel, n’est jamais arrêté, stabilisé, défini… Ce qui fait la voie aux yeux de la sagesse est son caractère viable…. Elle est la voie par où « ça va », par où c’est « possible », par où c’est viable. » (pages 112 à 119)

Depuis de nombreuses années, la situation politique et économique de la France est éminemment « congruente », avec son intrication dans la politique des institutions européennes, et on voit bien dans la gestion des affaires de l’Europe que la vieille distinction entre gauche et droite est de moins en moins opératoire.

Avec Bayrou, le centre n’a pas saisi la chance historique que cette situation lui offrait, mais la même problématique demeure, et la nouvelle majorité socialiste a bien été obligée de s’engager sur ce terrain de la congruence, avec un premier virage, celui de la règle d’or des 3%, et un deuxième virage, celui du pacte de compétitivité, fondé sur le rapport Gallois.

Quand nos hommes et femmes politiques auront-ils le courage d’afficher le degré réel d’autonomie, pour ne pas dire d’indépendance de la France dans le jeu actuel des institutions de l’Union européenne et des affaires du monde, pour ne pas parler du « spectre » des marchés, et en définitive de reconnaître qu’il faut choisir » la voie par où  « ça va » ?

Nos hommes et nos femmes politiques continuent imperturbablement à solliciter des mandats au sein de nos conseils généraux ou régionaux, au sein de nos assemblées parlementaires, alors que les affaires se traitent et se décident ailleurs, à Bruxelles notamment.

La vérité est que la politique française ne peut être autre chose de nos jours qu’une politique d’accommodation, d’adaptation au milieu européen et mondial, pour ne pas dire d’accommodement avec le monde réel, et au mieux d’animation et d’inspiration.

La gauche vient de prendre un  véritable virage sur ce terrain du réel, c’est à dire de la congruence, mais il faudra encore que le parlement entérine le pacte de compétitivité annoncé par le gouvernement, et que ce pacte entre réellement dans les faits, ce qui ne sera pas facile.

De ces longs débats, retenons volontiers une expression qu’a utilisée Louis Gallois dans une de ses interviews, celle d’un « Club France » qui doit être à la manœuvre et à l’œuvre pour tenir notre challenge de la compétitivité, avec une des mesures capitales de ce pacte, l’association des salariés dans la prise de décisions de nos grandes entreprises.

Et c’est là tout l’enjeu stratégique d’un Club France !

Une partie à peine commencée qu’il faut gagner !